Enel (Prince Michel Vladimirovich Skariatine), en collaboration avec Guy Thieux, Le Monde astral et l’occultisme, IBAcom éditeur, 217 p., 20 €.
Jadis, les magazines de télévision, passionnément parcourus, indiquaient en marge des films programmés « Pour adultes » ou « Pour adultes et adolescents ». Et ils étaient généreux en restrictions et censures. On sait que le mot ‘‘obscène’’ s’accole à ce qui se montre sur scène mais ne le devrait pas selon les canons de la moralité : le même raisonnement peut se transposer en matière doctrinale. Il y a l’orthodoxie et les diverses et innombrables hétérodoxies, la norme, ce qui est l’opposé de la norme et ce qui est en dehors de la normativité.
L’ouvrage ici discuté – on dirait autrefois disputé – est éminemment recevable. Vous examinerez d’abord la liste des noms cités, aussi bien le fameux Emile Coué, le critique d’art Paul Adam, Edmond Rostand, le médium, psychomètre anglais Alfred Peters, le Dr Teste, homéopathe, Scott-Elliot, théosophe, Gustave Le Bon et autres médecins, chimistes, métapsychistes, physiciens, juristes and son on, français, anglais, allemands ou russes pour la plupart, d’une inventivité cognitive, d’une ingéniosité remarquables et voulant s’inscrire dans une démarche dont toute la question est de déterminer sa scientificité.
On répondra que ces chercheurs nous livrent d’emblée la réponse. Ils estiment qu’il existe des matières et un mode de recherche qui, non seulement ne répondent pas (voire ne peuvent répondre) aux canons de la démarche scientifique tels que définie par Claude Bernard et Karl Popper mais qui, en outre, doivent afin de prospérer, se préserver de tout esprit démocratique.
Sans entrer dans la discussion portant sur la délimitation de l’objet de l’anathème : la gnose ou uniquement le gnosticisme, il est patent qu’au XIXème et au XXème siècles, nombres de ces chercheurs ont cru qu’il pouvait exister des départements de la connaissance réservés par nature à cette approche. Outre qu’il n’est pas certain qu’existent des initiés (donc, au stade précédent, des ‘‘initiables’’) par nature, il n’est pas non plus avéré que les phénomènes allégués soient en eux-mêmes redevables d’une pareille appréhension, nonobstant en outre le fait que ces ‘‘occultistes’’ usent d’une taxinomie bien sauvage, subsumant sous un même vocable, des faits, des phénomènes, des domaines appartenant à des ordres bien différents (par exemple, la radiesthésie et l’astrologie). En somme, ils donnent à la science (la science sans adjectif dirons-nous…) des verges pour se faire battre.
Nonobstant ainsi ces réserves qu’une vaste préface pourrait, devrait décliner, développer sur nombre de plans (épistémologique, théologique, psychologique, logique, parapsychologique, philosophique etc), le lecteur averti établira des ponts, des rapprochements, des connexions voire seulement des métaphores entre les faits ici étudiés et les découvertes des neurosciences : il y a bien dans les sciences se disant occultes des embryons de science tandis qu’en parallèle, la science dirons-nous classique ne doit pas continuer à rechigner à envisager la possibilité de l’existence de ces mêmes faits.
Ce livre appelle donc son commentaire sous la forme et la taille d’un autre livre. Et, en d’autres termes, dirons-nous qu’il s’agit là d’un ouvrage estimable aux deux sens du terme : digne d’estime, de considération et qui mérite d’être soupesé, évalué plus avant. Et envisagé comme un recueil de données hypothétiques, conjecturales, viatiques vers une science du futur en voie d’élaboration.
Hubert de Champris
0 commentaires